Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
En petite foulée
2 juin 2017

Par "H" aujourd'hui : Les enfants terribles

Ils étaient cinq, très proches par l’âge et avaient toujours des idées lumineuses, pour ne pas dire explosives, les jours fériés, le week-end et les vacances, lorsque ces journées sans école devaient se passer à la maison.

Le jardin était grand, le mur d’enceinte bien que haut, parfaitement escaladable  pour des genoux cagneux et entrainés, les arbres fruitiers prématurément délestés de leurs fruits  par les dix mains agiles et gourmandes, le chêne centenaire qui trônait au milieu du gazon n’avait plus aucune branche  secrète  pour la fratrie, dont les membres étaient liés comme les cinq doigts de la main.

Dimanche, réveillés tôt car c’était la fête des mères, les enfants avaient projeté de faire un gâteau  pour leur maman.
 Les dessins préparés à l’école, les plâtres peints, les petits cœurs et les messages « A la plus belle maman du monde » « Maman je t’aime » étaient soigneusement cachés pour ne pas être découverts  avant le moment crucial où ils allaient  souhaiter bonne fête à leur mère  avec force câlins et embrassades.

La veille ils avaient fait leurs courses discrètement dans le placard de la cuisine : poignées de farine puisées dans la boite, huile,  levure, œufs et sucre en poudre aux mesures aléatoires le tout dans des récipients peu appropriés, récoltés dans  la buanderie au fond du jardin qui servait aussi de débarras.

Ils s’enfermèrent dans  cet atelier improvisé et  l’ainé prit les commandes des opérations pendant que le plus jeune était posté à l’entrée  pour avertir du moindre danger qui viendrait  empêcher lle déroulement du projet.

Une bassine en plastique fut récupérée sur une étagère pour servir de pétrin.
Ingrédient versés au pif, et mélangés  à l’aide de deux mains, rapidement passées sous le robinet. Tous les yeux étaient fixés sur la grande sœur qui  s’activait les manches retroussées. La pâte trop dure relevait plus de la pâte à pain que d'une pâte à génoise ou à cake.

Bientôt tous voulurent  y mettre la main et le futur gâteau fut partagé en cinq pour être pétri par tous  car il s'agissait d'un cadeau en commun.

Concentrés, sérieux, heureux et fiers chacun y alla de ses compétences pour au final obtenir une masse grisâtre parsemées de quelques poils de chiens  qu’ils enlevèrent soigneusement. L'ainée eut le privilège de donner une forme de gâteau à la "chose".

Un couvercle de vielle marmite  en aluminium avait été réservé la veille et lavé pour servir de plaque de cuisson.
Huilé à l'aide de cinq mains, il reçut en son centre sans grand incident, le futur gâteau de fête des mères.

Restait la cuisson … il était hors de question d’utiliser le four de la cuisine  pour des raisons de discrétion.  C'est ainsi que  la veille, les enfants avaient subtilisé une boite d’allumettes et quelques bûches  prises dans la réserve où elles étaient entassées pour les feux de cheminée l’ hiver.

Le fond de l’évier à lessive en granito, fut soigneusement asséché.
Les buches placées, les allumettes grattées, le bois ne prenait pourtant pas feu … Il devait y avoir un truc.

Le numéro 2  un garçon particulièrement casse- cou dénicha une bouteille sur une étagère l’ouvrit et  en respira le contenu  «  c’est de l’alcool à brûler ça peut aider à allumer le feu » lança-t-il fier de sa découverte.
Après un rapide conciliabule il fut décidé qu’on verserait  le contenu sur les bûches pour les aider à prendre feu plus rapidement.

Ainsi fut fait … heureusement qu’aucun  des enfants n’était penché sur l’évier lorsque l’allumette fut jetée au milieu du tas de bûches.
Une flamme gigantesque alla lécher le plafond  en menaçant  tout ce qui se trouvait autour. Et pour cause, le flacon renfermait de l’essence.

Le sang-froid des grands était digne de celui des chefs de bandes. Les deux petits furent conduits en dehors de la buanderie pendant que le casse-cou  ouvrait  le robinet de l’évier derrière la flamme et que les filles  remplissaient des récipients arrachés à droite et à gauche pour aller remplir de l’eau au robinet du jardin à deux pas.

Les petits qui n’avaient pas encore assimilé le code de l’honneur qui consistait à ne jamais rapporter ou colporter ce qui se faisait  ou se disait dans le groupe (même sous la torture)  probablement impressionnés par les flammes et craignant pour la vie de leurs ainés, coururent en pleurs vers la maison pour donner l’alerte.

Les parents arrivèrent effrayés  suivis par le jardinier qui se trouvait du côté de l'entrée, alerté par les cris. Le feu fut maitrisé plus vite qu’il ne fut allumé.
 Seul le plafond noir et la fumée attestaient de la mésaventure, ainsi que l’étrange pâte plus grise encore, qui gisait dans un coin, oubliée, mais qui avait gardé  l'allure d'un projet amoureusement préparé.

Prologue : Réunis au salon,  les enfants  eurent droit  au sermon paternel qui commençait  à chaque  phrase par « Que serai-t-il arrivé si … »

La  tête baissée ils n’avaient pour leur défense que la vérité :  « on voulait faire un gâteau pour maman ». Ce qui eut pour résultat d’attendrir les cœurs et de minimiser la sanction. 

         Coloriages : bonne fête maman !

Publicité
Publicité
Commentaires
P
Très vécu :)<br /> <br /> "H"
Répondre
A
Oh... c'est tout mignon :) ça sent son vécu non ?
Répondre
En petite foulée
Publicité
En petite foulée
  • Sans strarting block ni ligne d'arrivée ... blog à 6 mains tissé par A, C et H par dessus-la Méditerranée. Piste bien tracée puis chemins accidentés, cours d'eau à franchir, sols boueux, courbes glissantes et sommets escarpés.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Derniers commentaires
Archives
Pages
Visiteurs
Depuis la création 1 862
Publicité